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Lip Nautic Ski, le charme français

J’aime les montres à double couronne. Elles ont un petit truc en plus. Une 2ème couronne vous allez me dire. Et vous avez raison. Focus sur un modèle représentant dignement cette famille, la Lip Nautic Ski.

La Lip Nautic Ski fait partie du patrimoine français.

Il en est ainsi de cette petite Nautic Ski. Petite n’est pas péjoratif. On peut utiliser cet adjectif pour parler de sa taille, ou de la modestie de son tarif. Mais avant de la détailler, revenons quelques (dizaines d’) années en arrière.

En 1967, afin de fêter les 100 ans de la marque, Lip présente la Nautic Ski, « la 1ère montre française étanche à 200m » dit la marque. Ce n’est pas faux, même si la Yema Superman présentée en 1963 est étanche à 300m, et donc, de facto, à 200m aussi ! Soit. Descendante de la Lip Nautic, elle en reprend le design et la technologie, notamment le boitier Super Compressor à double couronne, nous y reviendrons. Par contre, elle intègre le mouvement Lip Electronic R184. Précisons que ces mouvements électroniques (le nom est un peu pompeux, on devrait plutôt dire électrique) ne sont pas des mouvements à quartz, la 1ère montre à être commercialisée avec un calibre à quartz ne sera présentée que le 25 décembre 1969 par Seiko. Le calibre R184 est un calibre mécanique, alimenté par une pile. Le barillet à évidement disparu, le balancier spiral est mis en branle par une excitation électrique et régulé magnétiquement. Notons que c’est une solution assez commune pour l’époque, et que toutes les grandes marques proposent ce type de technologie.

Publicité pour la Lip Nautic Ski de 1968

Le boitier Super Compressor, qui équipe cette Nautic Ski n’est pas propre à la marque. Il s’agit en fait d’un design breveté par une entreprise suisse, Ervin Picquerez SA. Il a été vendu à de nombreuses marques, telles que Universal Genève, Bulova, Enicar, Fortis, Hamilton, Invicta, IWC, Jaeger-Lecoultre… Il se caractérise par sa double couronne. La couronne à 4h sert au classique réglage de l’heure, tandis que la couronne à 2h permet de régler la lunette interne tournante servant à mesurer les temps de plongée. L’étanchéité est garantie par la couronne vissée, ainsi que par un fond de boite plein, vissé également, couplé à un ressort de compression. Plus la pression augmente, plus le fond de boite appuie sur le joint afin de garantir l’étanchéité de la montre.

Un petit aparté sur ce drôle de nom : la Nautic Ski. Il ne fait pas référence au sport nautique à l’éponymie inversée. Il serait un clin d’œil à Muriel, la fille de Fred Lipmann, lui-même petit-fils d’Emmanuel Lipmann, créateur de la marque. Elle fût membre de l’équipe de France de ski alpin de 1950 à 1956. La montre devant devenir la montre officielle des équipes de France des JO de Grenoble 1968, il s’avérera doublement pertinent.

Ce préambule indigéré, nous pouvons à présent nous intéresser au modèle que j’ai eu l’occasion de porter pendant quelques semaines.

La version 671504 est plus consensuelle, elle a également moins de personnalité

La référence 671504 est une version modernisée, et avouons-le, dépersonnalisée de la Nautic Ski originelle. Evacuons ces détails tout de suite, nous aurons l’esprit plus libre pour la suite. Exit les index hypertrophiés, et les gros chiffres 12-6-9. Exit également la grosse aiguille flèche des minutes et l’aiguille lollipop des secondes. Tout ce qui fait une grosse partie de la personnalité et du charme du modèle d’origine est ici passé à la trappe. Une certaine déception. Qu’on se rassure cependant, il est toujours possible de commander sa Nautic Ski dans cette configuration ! Ouf !

Alors que la version originelle mesurait 36mm de diamètre, cette réédition, présentée en 2014, a été légèrement agrandie et mesure maintenant 38mm de diamètre pour une épaisseur de 15mm. Une petite taille donc, rapportée aux standards actuels. Cependant, l’absence de lunette externe, et un cadran qui occupe quasiment tout le diamètre de la montre compensent cette taille modeste, et une fois au poignet, elle ne semble pas si petite. Je suis pourtant habitué aux montres de taille plus conséquente, et ne trouve que rarement mon bonheur dans les montres vintage, à cause de ce problème de taille. Mais je n’ai pas ressenti ce problème avec la Nautic Ski. Bien sûr, les 38mm ne rendent pas comme un 42mm, mais la sensation au poignet est agréable. La personnalité du boitier, les 2 couronnes, les cornes fines, la faible largeur de l’entrecorne (18mm) font de la Nautic Ski une proposition quasiment unique sur le marché, et le charme agit instantanément. Il a même agi sur ma compagne, pourtant pas adepte des montres de plongée. Mais cette taille contenue, et ce look vintage lui ont tapé dans l’œil. De plus, ce cadran bleu soleillé qui passe du bleu marine au bleu azur en fonction de la luminosité est vraiment très réussi. Et le choix d’un cadran plus consensuel et d’aiguilles bâtons moins typées est plus à même de séduire un public néophyte et/ou féminin. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. Le public féminin n’est pas nécessairement néophyte et inversement !

La Lip Nautic Ski, grâce à sa taille contenue, plait également beaucoup aux femmes.

Continuons donc à détailler le visage de notre Nautic Ski (enfin, celle de ma compagne, j’ai bien saisi le message subliminal si subtilement amené au bord de la piscine entre 2 gorgées de mojito !). Le cadran bleu est donc équipé d’index appliqués carrés, si ce ne sont les 3 rectangulaires, à 6, 9 et 12h, accueillant les heures susnommées. A 3h, point d’index, mais un guichet permettant l’affichage de la date (je laisse le terme de quantième aux journalistes spécialisés). Profitons de nous intéresser à cette dernière pour une petite remarque. Les calibres modernes sont pour la plupart de diamètre contenu, et pourtant, la mode étant aux montres de grand diamètre (42mm et plus), il n’est pas rare de se retrouver avec un calibre perdu dans une grande boite, et un guichet de date dans une position incongrue, en plein milieu du cadran ! Point de ça ici, le calibre Miyota de 11 » ½ se trouvant parfaitement à sa place dans cette boite à la taille modeste. Cerclant le cadran, nous trouvons la lunette interne de plongée, de type compte à rebours sur cette version. Le segment des 20 dernières minutes est rouge, ça apporte une petite touche de couleur bienvenue, et c’est bien pratique pour la cuisson du riz. Elle se règle grâce à la couronne à 2h, non vissée, et qui a tendance à tourner toute seule. Conseillons donc aux plongeurs de ne pas se fier uniquement à leur Nautic Ski pour calculer leur autonomie ! Les aiguilles bâtons, déjà évoquées, sont recouvertes de matière luminescente, ainsi que les index. Point d’éblouissement à craindre de ce côté-là, mais l’effort est louable. Le verre saphir bombé qui équipe ce modèle est superbe (bath, chanmé, choisissez le terme qui vous convient le mieux en fonction de la génération dont vous faîtes partie…). Il participe pour beaucoup au charme suranné de notre Lip. Mêlant clarté et distorsion, il charme et envoûte.

Aiguilles batons, index appliqués, cadran soleillé, la Nautic Ski avance ses arguments.

Retournons la montre, et feignons la surprise de trouver un fond saphir. Quelle audace ! D’autant que le mouvement Miyota 821A offrant 42h de réserve de marche et battant au rythme de 21600 alt/h est d’une rare élégance. J’ironise. Ce mouvement moderne est loin d’être désagréable à l’œil. La masse oscillante ajourée, et les ponts décorés de côtes de Genève valent bien mieux que les finitions qu’on trouve sur nombre de calibre suisses de base et laissent un sentiment de qualité perçue justifié. Lipifié pour l’occasion, il flattera l’œil et l’ego de son porteur.

C’est un mouvement japonais qui équipe notre Lip.

La Nautic Ski est livrée avec 2 bracelets. Heureuse initiative. Le bracelet cuir sera le meilleur choix, car le caoutchouc type « Tropic », au design superbe et parfaitement adapté est malheureusement particulièrement inconfortable. Je n’ai pas eu le temps de tenter de l’assouplir dans l’eau bouillante afin de voir si ce truc digne de Rika Zaraï pouvait nous réconcilier, lui et moi. La petite boucle ardillon est gravée au laser du logo de la marque, c’est un détail de finition sympathique.

Alors, que penser de cette Nautic Ski ? Le plus grand bien serai-je tenté de répondre. Certes, la finition du boitier ne restera pas dans les annales, et les bracelets livrés promettent encore de beaux jours aux ateliers spécialisés tels qu’ABP ou Camille Fournet. Mais cette Lip possède un vrai charme et une belle personnalité. Sa taille de 38mm lui offre même un éventail de clients assez rare. Une présence au poignet qui lui permet d’être tout à fait adaptée aux hommes, et une taille contenue qui ravira les femmes. Affichée à 499€, disponible dans différentes couleurs, elle sera le cadeau parfait pour une femme à son homme, qui pourra lui emprunter à l’occasion…, ou l’inverse !

La Lip Nautic Ski est à l’aise en milieu marin !

Merci à la bijouterie Patrick Joly, à Senlis pour le prêt de la Nautic Ski.

2 commentaires

Bonjour,

La référence 671504 que vous avez essayée n’ est pas une version modernisée et dépersonnalisée de la Nautic Ski originelle, c’est la réédition d’un des modèles de Nautic ski électronic certes moins connu que le modèle le plus vendu présenté dans la publicité de l’époque de votre article.
on trouve ce modèle en occasion sur différents supports, vous pouvez vérifier par vous même.
l’autre réédition est identique à celle de la publicité de l’époque,elle est disponible en 4 couleurs de cadran.
bien cordialement

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Bonjour j’ai acheté la Nautic en 1968 juste après les J.O. de Grenoble, malheureusement suite incendie de ma maison je l’ai perdue, vous me conseillé qu’elle modèle, 38 ou 41 , pas GIGN, puisque j’étais instructeur en école de Gendarmerie, retraité depuis 18 ans , mais toujours esprit commando.
Ya t’il de bonnes occasions , mais je pense vaut mieux investir dans du neuf, possibilité acheter à l’usine?Bien à vous

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